• Les Pigeonniers

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    La présence de colombiers en France est seulement indiquée après l’invasion romaine par Jules César. L’élevage des pigeons était alors une passion à Rome et des ouvrages sur l’élevage des pigeons et la construction des colombiers ont même été écrits notamment par Pline l’Ancien entre autres. 

    A l’époque féodale, un colombier était un édifice pour loger et élever des pigeons. Il est appelé plus souvent pigeonnier depuis le XVIIIème siècle.

    Les colombiers ont marqué les paysages en Midi-Pyrénées (Gascogne, Quercy, Occitanie toulousaine) mais aussi dans d’autres régions de France. Ils sont plus nombreux dans les régions céréalières ou de vignobles même si au fil du temps, cet élevage a été peu à peu condamné par la mutation de l’agriculture notamment par l’introduction de cultures différentes.

    Les pigeons étaient élevés pour « la colombine », nom donné à leurs fientes car c’était un excellent engrais ; mais ils étaient aussi destinés à la table comme mets de choix. La valeur de la « colombine » était tellement importante, qu’elle faisait partie des biens listés dans les ventes ou les apports dans les contrats de mariage.

     

    Les Pigeonniers réservoir à colombine pigeonnier château de Bonaguil

    Pigeonnier du Château de Bonaguil, Lot-et-Garonne

    Pièce sous le pigeonnier « Réservoir à colombine » où cette dernière était recueillie

     

    Les colombiers à pied de forme ronde et séparés du corps de logis étaient nobiliaires et privilège des seigneurs hauts justiciers.

    Pour les autres constructions nobles ou non, les constructions sont carrées sur piliers ou arcades, accolées à la maison, placées au-dessus d’un porche d’entrée, d’un poulailler ou simples fuies de quelques trous sur la façade.

    Mais richement édifiées ou non, elles étaient en proportion de l’importance de la propriété et le nombre de boulins (poteries d’argile insérées dans le mur ou niches creusées dans l’épaisseur de ce dernier) en était l’indicateur ; la norme est un boulin par journal sachant que le journal est défini ainsi : le journal représentait la surface qu'une personne pouvait labourer avec un cheval en une journée, ce qui correspondait à 50 ares (1/2 hectare). Le nombre de boulins dans certains gros colombiers pouvait être considérable (plusieurs milliers).

    Pour les volières intégrées à une étable, une grange ou un hangar, le propriétaire, noble ou non, devait posséder au moins 50 arpents (environ 2,5 hectares) de terres labourables, pour une capacité ne devant pas dépasser suivant les cas, 60 à 120 boulins. 

    On construit le colombier loin des grands arbres qui peuvent abriter des rapaces et à l’abri des vents dominants ; sa construction obéit à quelques règles de sécurité :

    - portes d’accès hermétiques

    - murs lisses munis d’un bandeau en saillie afin d’interdire la montée aux prédateurs (fouines, belettes, rats…). Cette bande était sur certains pigeonniers matérialisée par des carreaux de terre cuite vernissée.

    Les colombiers et pigeonniers peuvent être de matériaux, de formes et de dimensions très variés qui tiennent autant à l’architecture de la région, qu’au rang du propriétaire et à sa fortune mais aussi à l’inspiration des artisans chargés de leur édification.

     

    Architectures diverses :

     

    Outre les colombiers à pied de forme ronde et ceux de forme carrée, on trouve quelques colombiers présentant une forme octogonale dont l’esthétique est appréciée.

     

    Les Pigeonniers colombier sur pied du Château Chesnel Charente

    Colombier du Château Chesnel (Charente)

    L’édifice a malheureusement perdu sa toiture d’origine

     

    Les pigeonniers sur piliers ou sur arcades sont surtout présents en Midi-Pyrénées et en Aquitaine. Certains présentent quatre, six ou même huit colonnes en pierre de deux mètres de hauteur.

     

    Les Pigeonniers pigeonnier sur arcades Abbaye de Flaran Gers

    L’un des deux pigeonniers de l’Abbaye de Flaran, Gers

    Celui-ci est dans un triste état !

     

    La caisse ou "volière",  est soit en maçonnerie (grès, briques ou calcaire), soit à colombage ou pans de bois dont les espaces sont remplis de torchis, de pisé ou de briques cuites.

    Les pigeonniers sur arcades sont de véritables monuments de plus de 10 mètres de hauteur. La caisse est supportée par des piliers et une voûte en maçonnerie. Les toitures ne sont pas uniformes : recouvertes de tuiles plates ou d'ardoises, elles sont soit à clocheton, soit pyramidales, soit de type " pied de mulet".

     

    Les Pigeonniers pigeonnier sur arcades du Château de Beillard Haute-Garonne

    Pigeonnier du Château de Beillard, de type polygonal sur piliers cylindriques en pierre monolithe

    Merville, Haute-Garonne

     

    Les pigeonniers couronnant les porches, plus modestes et moins élevés que les précédents sont généralement de forme carrée.

    Les pigeonniers troglodytiques font exception. Incrustés dans les parois d'anciennes carrières, de caves ou à flanc de falaise comme à Beynac, les nids sont creusés dans la roche, parfois jusqu'au bas des parois.

     

    Description des différentes parties du pigeonnier :

     

    Les Pigeonniers description architecture pigeonnier

     

     

    Les randière, larmier, bandeau ou cordon

    Ils ont la forme d’une corniche constituée de pierres plates placées en saillie d'une dizaine de centimètres, qui ceinture extérieurement le pigeonnier. Leur aspect esthétique ne doit pas faire oublier qu’ils sont là pour empêcher les prédateurs, en arrêtant leur ascension, de parvenir jusqu'aux nids mais aussi de rejeter l'eau de pluie loin du mur.

    La randière est la plupart du temps en pierre mais aussi en brique, en ardoise ou en zinc. Sur certains pigeonniers, elle est remplacée par une ceinture de briques émaillées ou de carreaux de terre cuite vernissée. 

    Les pigeonniers sur piliers, sont munis de « capels », demi-sphères de pierre placées au sommet des piliers pour empêcher l’ascension des prédateurs. Mais on trouve souvent une randière sur des pigeonniers à piliers pourvus de capels. Deux précautions valent mieux qu’une !

     

    La corniche 

    Elle fait la transition avec le toit et est constituée par des pierres plates, des briques ou des tuiles (on parle alors de génoise), placées en ressaut d'une dizaine de centimètres pour assurer l'égout du toit dans les meilleures conditions, c'est-à-dire loin du mur. Elle supporte la charpente et souvent les lucarnes d'envol tout en étant aussi un élément du décor des colombiers.

     

    La charpente 

    Si la charpente des toitures à un, deux ou quatre versants n'offre guère de difficulté d'installation, en revanche celle des colombiers à toiture conique en poivrière, nécessite davantage de connaissances techniques, surtout si ces toitures sont coiffées d'un lanternon car cette conception impose une structure complexe et une solidité garantie à toute épreuve.

     

    La toiture 

    Qu’elle soit conique, à toit simple, double ou à coupole, la toiture est quelquefois ouverte en partie haute par un lanternon qui donne une autre allure au bâtiment et permet l'entrée et la sortie des pigeons comme l'aération du colombier. 

    Le pigeonnier dit Toulousain ou Méridional est lui, caractérisé par une couverture à deux toits successifs et décalés en marches d’escalier qui lui a valu le surnom de « pied de mulet ».

     

    La couverture et l’épi de faîtage

    Le style de la couverture dépend des régions : dans la partie septentrionale de la France, on trouve l'ardoise sur le toit des colombiers et pigeonniers érigés aux abords des châteaux et des maisons de maître, alors que dans la partie sud de la France, la couverture traditionnelle est plutôt la tuile plate ou la tuile canal pour les toitures. Dans certaines régions les couvertures sont en lauze. En Bretagne les colombiers ont une couverture en granit taillé.

    Les épis de faîtage et les girouettes sont décoratifs mais ont de plus une utilité d’étanchéité. Ils sont souvent surmontés d’un pigeon en vol ou à l'arrêt.

     

    Les lucarnes et lanternons 

    Les lucarnes et ouvertures d’envol, peu nombreuses, sont souvent réalisées en pierres de taille et installées en assise sur la corniche. Leur rôle essentiel était de laisser les pigeons libres de sortir à l'extérieur ou de les tenir enfermés au colombier car les cultivateurs voyaient les pigeons comme une catastrophe, en particulier au moment des semailles.

    Les lucarnes peuvent être remplacées par des fenêtres d'envol précédées de tables d’envol reposant sur des consoles.

     

    Les Pigeonniers plage d'envol pigeonnier du Castela Saint Sulpice sur Tarn

    Plage d’envol en forme de bénitier du pigeonnier du Castela, Saint-Sulpice-sur-Tarn

    Ce pigeonnier est toujours utilisé car depuis sa restauration, il accueille l'association « Les Ailes du Castela » (colombophile )

    ainsi qu’un musée du pigeon voyageur.

     

    Lucarnes ou fenêtres d’envol sont presque toujours orientées au sud et à l'est, à l'abri des pluies et des vents dominants de la région. Le soleil réchauffe ainsi le colombier l'hiver et ses rayons n'y pénètrent pas l'été.

    Les « Trous d’Envols » destinés à l'entrée et la sortie des pigeons, ont une ouverture maximale de 10 cm, afin d’interdire l’accès aux rapaces.

    Le lanternon généralement haut et effilé, sous forme de clocheton, coiffe le sommet de certains pigeonniers. Il est souvent recouvert d’ardoise en « écailles de poisson » mais en  Midi Pyrénées, la couverture des lanternons de très nombreux pigeonniers est faite en tuile plate.

     

    Les boulins ou nids 

    Les murs des pigeonniers et colombiers sont tapissés de rangées de boulins que séparent des bandeaux anti-vermines consistant en une rangée de pierre en saillie qui servent aussi au repos des pigeons. Ces boulins sont des espaces aménagés dans lequel niche un couple de pigeons ; ils peuvent être en pierre, en brique, en pisé, ou encore en terre cuite (poterie) et sont inclus dans la maçonnerie même du mur.

     

    Les Pigeonniers boulins du pigeonnier de l'Abbaye de la Chaume Loire Atlantique

    Boulins taillés dans la pierre, colombier de l’Abbaye de la Chaume, Loire Atlantique

    L’échelle a disparu et il ne reste que l’axe sur lequel elle pivotait.

     

    L’échelle

    Les bâtiments de moindres dimensions intérieures comme les pigeonniers-porche, les pigeonniers troglodytiques et pariétaux, sont démunis d'échelle.

    Pour tous les autres, cylindriques, carrés ou octogonaux, l'accès aux boulins se faisait au moyen d'une échelle tournante ; au centre du colombier se dresse une poutre d'axe vertical qui pivote sur une pierre dure appelée foire. A cette poutre sont rattachés un ou deux « bras » auxquels sont fixés une ou deux échelles dont les barreaux correspondent aux différentes rangées de boulins. Cette échelle permettait d'approcher facilement tous les boulins pour attraper les pigeons ou nettoyer les nids.

     

    Les Pigeonniers boulins et échelle tournante pigeonnier Côte d'Or

    Pigeonnier dans une propriété privée en Côte d’Or

    L’échelle et son support conservés : milieu de la partie supérieure de la photo

    Les boulins en pierre : à gauche dans la partie supérieure de la photo

     

     

    LE PIGEONNIER EN DETAIL...

     

    Arêtier :

    élément de couverture couvrant un angle saillant, généralement en tuile canal.

    Boulin :

    nid du pigeon pouvant être en pierre, en osier tressé ou tout simplement un trou bâti dans un mur.

    Capel :

    demi boule en pierre renversée posée sur les piliers servant à protéger le pigeonnier des prédateurs.

    Chapiteau :

    pierre de forme carrée ou ronde située entre le pilier et la base du pigeonnier.

    Epi de faîtage :

    Ornement en métal, céramique ou terre cuite décorant le sommet du toit.

    Génoise :

    rangée de tuiles canal formant une corniche sous le toit. La génoise peut être composée de plusieurs rangs.

    Grille d’envol :

    en bois, en plâtre, en pierre ou en brique, ces grilles sont percées de trous aux formes diverses pour le passage du pigeon.

    Plage d’envol :

    corniche en pierre ou en bois qui sert d’avancée extérieure devant la grille d’envol où se posent les pigeons.

    Randière :

    corniche débordante en saillie en brique, en pierre  ou en petits carreaux vernissés pour empêcher les rongeurs de grimper.

     

     

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    Sources :

     

    La Route des Pigeonniers du Tarn, Office du Tourisme du Tarn

     

    Pigeonniers de France

     

    Wikipedia